Be Horeca

Be-Caterer : La résilience du traiteur

Malgré les séquelles laissées par la pandémie, le métier de traiteur retrouve peu à peu son élan. Cette résilience témoigne de l’importance indéniable d’une profession parfois injustement oubliée. Rencontre avec Arthur Renwart d’Artfood Traiteur et Quentin Guinand de Quent on a faim.
Par Romane Henkinbrant

 

Traiteur, quésako ?

Arthur Renwart - Artfood
Arthur Renwart – Artfood

Apparu au Moyen ge, le terme « traiteur » désigne d’abord un marchand négociant. Plus tard, au XVIIIe siècle, parallèlement à la naissance du restaurant dans les milieux aristocratiques, les différents métiers de bouche – vinaigriers, charcutiers et rôtissiers, pâtissiers, taverniers… – furent réunis en un seul : celui de traiteur. Lors de la Révolution, les traiteurs ouvrent des restaurants pour subsister ou se déplacent vers Paris, attirant très vite la bonne société de Versailles et de la capitale. Au XIXe siècle, la profession explose et se diversifie : outre la cuisine, les traiteurs assurent la décoration, le service, la livraison… Polyvalent, le métier s’adapte aux tendances et aux nouvelles demandes de la clientèle. En plus du traiteur événementiel, qui lui-même englobe différents types de traiteurs spécialisés, le secteur inclut désormais le traiteur à domicile, proposant des repas gastronomiques dans l’intimité du domicile, le “catering” avec ses repas en boîte, le comptoir traiteur, ainsi que le traiteur de restauration collective, offrant une alternative aux restaurants. Aujourd’hui, le terme “traiteur” est englobe les multiples facettes d’un métier résolument pluriel.

 

Les principaux défis du métier de traiteur

Be-Caterer
Be-Caterer

Le métier de traiteur regroupe de nombreux défis logistiques et organisationnels, principalement axés autour des problématiques de transport, de matériel, de qualité et de durabilité.

La matière première

L’une des préoccupations grandissante dans le secteur de la restauration concerne la qualité des ingrédients, avec une emphase particulière sur l’utilisation de produits locaux et de saison pour minimiser l’impact environnemental. Comme le souligne Arthur Renwart, co-fondateur d’Artfood Traiteur, « on essaie de privilégier de plus en plus les produits locaux, en cherchant des filières à des prix raisonnables ». Quentin Guinand, fondateur et chef du traiteur Quent on a faim, a opté pour le même parti pris : « Le plus important pour moi, c’est de privilégier les produits de saison. Le bio est également une priorité, mais en raison de l’absence de certification, je ne peux pas encore le mettre en avant ».

Toutefois, cette démarche n’est pas sans défis : « Les difficultés surviennent lorsque j’achète de la viande ou des légumes bio », explique Quentin. « En conventionnel, je peux passer une commande jusqu’à deux heures du matin, et elle arrive à six heures dans mon atelier, ce qui est extrêmement rapide et flexible. En revanche, en bio, j’ai en moyenne une à deux semaines de délai de commande. Ce n’est pas toujours facile, mais j’essaie de m’y conformer ».

Pour élaborer leurs menus, certains traiteurs adoptent une approche plus souple en spécifiant “légumes de saison” afin de s’adapter aux disponibilités du marché. Cette démarche, bien que challengeante, permet de maintenir la fraîcheur et la pertinence des menus.

Éduquer les clients sur l’importance du respect des saisons revêt un aspect crucial pour le métier de traiteur. Comme l’explique Quentin, « parfois, les clients demandent des fruits rouges en hiver. C’est à nous de trouver des alternatives pour respecter les saisons et satisfaire la clientèle ».

Les régimes alimentaires

Quentin Guinand - Quen on a faim
Quentin Guinand – Quen on a faim

Les traiteurs doivent également répondre aux nouvelles attentes d’un marché de plus en plus exigeant, notamment en matière de régimes alimentaires spécifiques. Comme le souligne Arthur, « nous nous adaptons en fonction des demandes de nos clients, en proposant des menus qui répondent à leurs besoins spécifiques. Cela peut parfois entraîner des coûts supplémentaires – par exemple, la préparation d’une recette sans produits laitiers peut nécessiter une reconfiguration de toute la chaîne de production – mais nous ne pouvons pas imposer des tarifs excessifs à nos clients ».

Quentin explique ses efforts pour obtenir le label “Good Food”, reconnu pour son engagement envers les intolérances alimentaires et la durabilité. « À mon comptoir, la moitié des plats sont végétariens ou végétaliens. Pour les événements, je propose un menu de base, en encourageant les clients à communiquer leurs intolérances alimentaires. Cela demande de l’adaptation mais j’essaie de ne pas faire de discrimination dans l’assiette. Par exemple, si un plat fonctionne bien avec des noix de Saint-Jacques et de la purée de céleri, je vais remplacer les Saint-Jacques par un légume qui leur ressemble pour que visuellement, tout le monde ait l’impression de déguster le même plat. Je m’efforce également de créer des menus inclusifs pour celles et ceux qui choisissent de ne pas manger certains aliments pour des raisons de croyances ».

La gestion des déchets

Be-Caterer
Be-Caterer

C’est une problématique majeure à laquelle les traiteurs sont confrontés, d’autant plus avec l’obligation de tri des biodéchets professionnels en vigueur depuis le 1er mai 2023. « Nous sommes vigilants à ce sujet depuis la création d’Artfood Traiteur, en pratiquant le tri global des déchets », explique Arthur. « Nous disposons de toutes les poubelles nécessaires, du tri des plastiques, cartons, verre, tout-venant, jusqu’aux déchets organiques. Pour ces derniers, nous collaborons avec Recyclo, qui les collecte à vélo. Nous allons même jusqu’à trier les bouchons de Liège. Le matériel en fin de vie est également récupéré et redistribué aux Restos du Cœur ». Quent on a faim s’inscrit dans la même mouvance : « Nous cherchons constamment à minimiser la production de déchets, car le meilleur déchet est celui qui n’est pas produit ». La gestion des restes alimentaires Les traiteurs s’efforcent de minimiser le gaspillage en réutilisant les surplus. Parmi les solutions, les aliments encore consommables sont parfois proposés aux clients à emporter. Les plats non réchauffés, pour lesquels la chaîne du froid a été préservée, servent par exemple de repas pour le personnel ou sont distribués à des associations telles que les Restos du cœur, l’Ilot, ou encore Alpaca (qui intervient directement sur l’événement en reconditionnant les restes pour les redistribuer ensuite), même si cela peut occasionner des défis logistiques ponctuels.

La gestion des buffets représente un challenge supplémentaire.. Quentin explique : « Je n’aime pas particulièrement la formule « buffet » qui peut provoquer des surplus. L’incertitude du nombre de participants est un problème fréquent. Cependant, nous ne pouvons pas abandonner cette option très prisée en Belgique. »

Le matériel

Be-Caterer
Be-Caterer

L’utilisation de vaisselle réutilisable est une pratique privilégiée par de nombreux traiteurs en raison de son impact environnemental moindre et de la préférence des clients pour des options plus durables. « Nous avons toujours opté pour de la vaisselle « en dur » », explique Arthur. « Cela implique des aspects logistiques, notamment la nécessité de récupérer la vaisselle utilisée et donc la présence d’un chauffeur et des frais supplémentaires. De plus, nous devons effectuer un inventaire complet pour nous assurer que tous les articles sont revenus : il y a un risque assez important de perte ou de casse, ce qui complique la gestion. »

L’expérience est légèrement différente lorsqu’il s’agit d’un comptoir traiteur : « Initialement, nous avions des bols en porcelaine et des bols jetables pour servir nos plats », raconte Quentin. « Mais les plats réutilisables étaient toujours les premiers à partir. La consigne est de 5 euros, mais c’est assez pratique car il suffit de réchauffer le bol au four, de manger, puis de ramener le contenant pour récupérer la caution. Aujourd’hui, si les clients souhaitent du jetable, on leur propose de payer une “amende” de 1 euro pour transférer le contenu du bol dans un bol jetable. En réalité, personne ne le demande jamais ».

Le transport

« J’ai investi dans deux vélos-cargos et j’envisage d’en acquérir un troisième. Bien sûr, ce n’est pas adapté à toutes les situations. Par exemple, pour un événement de 100 personnes avec tout le matériel nécessaire, il faudrait une remorque équipée de suspensions. Cependant, nos clients sont très sensibles à cette démarche et impressionnés par notre engagement écologique. De nombreux nouveaux clients nous ont d’ailleurs contactés en raison de cette approche. En termes d’efficacité, le trajet en vélo prend généralement la moitié du temps d’un déplacement en camionnette. C’est un énorme gain de temps ”, explique Quentin.

Il souligne également les avancées dans ce domaine en déclarant : « Le traiteur Belgobon a élaboré une offre qui peut être entièrement réalisée en vélo-cargo. Cela démontre qu’il y a un changement en cours et que cette approche est réalisable ».

Le personnel

L’une des particularités du métier de traiteur est la grande diversité de professions qui le composent : service commercial, logistique, service, cuisine, pâtisserie, plonge… Les défis liés au personnel sont nombreux, en particulier depuis la crise du covid. Les employés ont des attentes salariales plus élevées et recherchent un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, ce qui se traduit par moins de flexibilité dans les horaires.

Une cohésion et un engagement envers le bien-être de son personnel sont des éléments cruciaux pour maintenir une équipe motivée et performante : « Il est très important pour moi que chaque heure travaillée soit payée », explique Quentin. « Cela a un impact évident sur le bien-être au travail. J’ai la conviction qu’il est possible de rémunérer justement les employés avec des heures de travail confortables dans le secteur de l’Horeca ».

L’énergie

Be-Caterer
Be-Caterer

La gestion de l’énergie constitue un défi majeur pour les traiteurs, car leur activité implique notamment l’utilisation intensive de réfrigérateurs, de fours et de grandes machines à laver, ce qui les rend très énergivores. Des efforts constants sont nécessaires pour minimiser la consommation d’énergie et faire face aux coûts croissants liés à ce domaine. Mais même si certaines entreprises, comme Artfood Traiteur, obtiennent des labels d’entreprise “écodynamique”, avec des exigences strictes en matière d’optimisation énergétique, les coûts qui y sont liés restent un poste de dépense significatif, avec des préoccupations supplémentaires liées à la vente du service.

Arthur explique : « Ce qui m’inquiète le plus, ce n’est pas tant le paiement de l’énergie en soi, mais plutôt la question des ventes. Tout est interconnecté : si nous avons des ventes, nous pouvons couvrir nos coûts énergétiques, mais si les entreprises décident de réduire leurs achats, cela peut entraîner un problème à plusieurs niveaux. Nous aurions alors à faire face à une augmentation de la facture d’énergie et à une réduction de la marge bénéficiaire, tout en tenant compte de la hausse des coûts des matières premières et de l’indexation des salaires ».

Pour atténuer ces défis énergétiques, certains traiteurs prennent des mesures proactives. Par exemple, l’investissement dans des équipements de cuisine plus économes en énergie contribue à réduire la consommation. De plus, la sensibilisation et la formation du personnel en cuisine sont essentielles pour optimiser l’utilisation des équipements, en veillant par exemple à ne pas allumer les fours inutilement et à planifier les cuissons de manière efficace.

Une autre solution, parfois difficilement reçue, est l’augmentation des tarifs. « La meilleure solution est d’en discuter avec ses clients », explique Quentin. « Je pense que la communication est l’atout le plus efficace dans cette situation. Tout le monde est conscient de l’augmentation des prix, et la transparence est essentielle ».

 

Artfood Traiteur

Be-Caterer
Be-Caterer

Fondée en 2009 par Arthur Renwart et Eugénie Sarkissiane, Artfood Traiteur est une maison contemporaine alliant gastronomie et modernité, avec une vision humaine et écoresponsable. Établie à Bruxelles, elle propose des menus et concepts originaux pour tous vos évènements, partout en Belgique, que ce soit à titre professionnel (séminaire, diner de gala, walking dinner, team building, buffet, barbecue, échoppes, fête du personnel, livraison de sandwichs…) ou à titre privé (mariage, rallye, garden party, communion, cocktail, anniversaire…).

www.artfood.be

 

Quent on a faim

Be-Caterer
Be-Caterer

D’une soirée en tête à tête ou entre amis dans le confort de votre maison à un événement de 500 invités (mariage, communion ou autre réception) en passant par un comptoir traiteur et épicerie fine installé au Be-Here, Quentin Guinand a plus d’un tour dans son sac. Avec son traiteur Quent on a faim, il s’adapte à vos besoins grâce à un service sur mesure et une cuisine axée sur le fait maison, le local et de saison.

www.quentonafaim.be